Le 4 septembre 2024, la première chambre civile de la Cour de cassation a rendu un arrêt fondamental en matière d’indemnisation du préjudice corporel (n° 23-14.232), réaffirmant un principe essentiel : la victime d’un dommage corporel survenu dans son jeune âge, et qui se trouve privée de toute possibilité d’exercer une activité professionnelle, a droit à la réparation intégrale de son préjudice, y compris au titre de la perte de gains professionnels futurs.

Cette décision s’inscrit dans la droite ligne du principe de réparation intégrale du préjudice, sans perte ni profit pour la victime. Elle revêt une importance particulière pour les enfants victimes d’accidents médicaux, d’accidents de la vie ou d’accidents de la route, dont l’avenir professionnel est irrémédiablement compromis.

 

Une victime mineure, lourdement handicapée à la suite d’un accident médical à la naissance

L’affaire concerne une jeune fille, [B] [R], gravement handicapée à la suite d’un enfoncement crânien survenu lors de sa naissance en 2002, à la suite d’un recours fautif aux forceps par un praticien. La responsabilité de ce dernier a été retenue par décision judiciaire irrévocable en 2008.

Face à l’étendue du préjudice, les parents de la victime ont engagé une action en indemnisation intégrale, sollicitant la réparation de tous les chefs de préjudice, notamment celui relatif à la perte de gains professionnels futurs, alors même que l’enfant, du fait de son handicap, n’avait jamais exercé d’activité salariée.

 

Une interprétation erronée du préjudice par la cour d’appel

Par un arrêt du 1er février 2023, la Cour d’appel d’Agen avait limité l’indemnisation de la perte de gains professionnels futurs à une simple perte de chance, au motif qu’aucune activité professionnelle antérieure ne pouvait être identifiée et que le parcours professionnel de la victime restait incertain.

La juridiction d’appel en a conclu qu’il n’y avait pas de perte effective de revenus et que la réparation devait être limitée à une probabilité d’accès à l’emploi.

Or, cette analyse heurte frontalement le principe fondamental de la réparation intégrale du dommage corporel.

 

Une perte de gains futurs certaine, même en l’absence de parcours professionnel accompli

La Cour de cassation censure cette motivation. Elle rappelle avec force que lorsque l’état de la victime, dès le plus jeune âge, la prive de toute possibilité d’exercer une activité professionnelle, le préjudice en résultant doit être regardé comme certain, et non comme hypothétique.

Elle précise que l’impossibilité totale d’exercer un métier à cause du handicap constitue un préjudice personnel direct et indemnisable, indépendamment de tout parcours académique ou professionnel accompli.

Il s’agit d’une avancée jurisprudentielle majeure qui vient sécuriser le droit à réparation intégrale des victimes les plus vulnérables, en particulier les enfants gravement blessés.

 

La perte de gains futurs : un poste autonome et indemnisable en capital ou en rente

Dans sa décision, la Cour casse également la disposition de la cour d’appel suspendant la rente allouée à ce titre en cas d’hospitalisation prolongée de la victime. Elle rappelle que la perte de gains professionnels futurs n’a pas vocation à dépendre de l’état ponctuel d’hospitalisation, mais indemnise la privation permanente d’accès à une activité rémunérée, du fait de l’incapacité engendrée par le dommage.

La rente versée, ou le capital représentatif, ne peut donc être remis en cause en fonction de la situation médicale temporaire de la victime. Ce rappel est essentiel, notamment dans les cas où les victimes sont hospitalisées de manière récurrente pour des soins de rééducation, de surveillance ou de traitement des séquelles.

 

Un rappel fort du principe de réparation intégrale

En définitive, la Cour de cassation réaffirme le socle du droit du dommage corporel : le préjudice doit être indemnisé dans sa totalité, de manière certaine et complète, sans réduction, ni modulation, ni remise en cause, lorsque les conséquences du dommage sont établies avec certitude.

L’arrêt du 4 septembre 2024 constitue une pierre angulaire de la jurisprudence en matière d’indemnisation des enfants victimes de dommages graves. Il invite les juridictions du fond à ne pas céder à une analyse restrictive des postes de préjudice, particulièrement lorsqu’il s’agit de réparer des vies définitivement brisées par un accident ou une faute médicale.

 

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